A quoi bon une déontologie ? Peut-être parce que s’il n’y en a pas … il y en a une quand même, implicite, subie (et non pensée). Or, si la déontologie est implicite, il est difficile...
AFOCAL
AFOCAL

La déontologie du formateur (1)

Article de Marc GUIDONI Commentaires fermés sur La déontologie du formateur (1)

A quoi bon une déontologie ? Peut-être parce que s’il n’y en a pas … il y en a une quand même, implicite, subie (et non pensée). Or, si la déontologie est implicite, il est difficile d’harmoniser l’ensemble des pratiques des formateurs mais aussi d’incarner l’identité de l’AFOCAL dans des pratiques qui lui correspondent.

- intervention de Simon Rochereau, professeur agrégé de philosophie, à l'occasion de la formation des formateurs BAFD à Marseille (novembre 2008) -

A quoi bon une déontologie ? (Après tout, nous avons déjà des critères d’évaluation, une Déclaration fondamentale et un certain nombre d’autres textes de référence). Peut-être parce que s’il n’y en a pas … il y en a une quand même, implicite, subie (et non pensée). Or, si la déontologie est implicite, il est difficile d’harmoniser l’ensemble des pratiques des formateurs mais aussi d’incarner l’identité de l’AFOCAL dans des pratiques qui lui correspondent. Réfléchir à une déontologie explicite, c’est permettre de se situer clairement : cela permet de positionner l’AFOCAL, dans son identité propre, non pas théorique mais incarnée dans des pratiques cohérentes, qui sont ainsi défendues – portées par les formateurs - parce qu’elles ont été réfléchies et discutées.

Comment proposer une identité ferme, porteuse d’un sens déterminé (¹vague ou neutre), sans exclure et la réduire à une liste d’interdits ? Une déontologie peut-elle être établie concrètement sans constituer une liste limitative et une identité défensive ?

La diversité des positionnements singuliers – et le respect de la différence - sont-ils compatibles avec une déontologie commune sans que chacun renonce à soi ?

I/ Morale, éthique, déontologie : positionnement réciproque en vue de la construction d’une définition de la déontologie telle qu’on pourrait la souhaiter

La morale et l’éthique définissent toutes deux des règles de conduite, des valeurs de référence pour l’action et le jugement, dans une société donnée, mais avec une visée d’universalité.

A) A l’origine et aujourd’hui encore dans certaines traditions, elles sont considérées comme synonymes, « éthique » venant du grec et « morale » renvoyant au même contenu, dans sa traduction latine.

Dans un rapport général (qui n’établit pas la distinction), la déontologie est – à la fois – MOINS et PLUS que la morale ou l’éthique.

- D’un côté, c’est MOINS par rapport au champ concerné. La déontologie se prononce sur un cadre lié à une pratique professionnelle ou technique (Ai-je le droit de recruter en session ?) et non sur des questions morales (ou éthiques) générales (Y a-t-il parfois de justes mensonges ?).

- D’un autre côté, c’est PLUS car cela appelle des règles plus concrètes, opérantes en situation. Morale et éthique appellent au respect, la déontologie se demande si les formateurs peuvent se servir (même raisonnablement) de l’alcool à table et en proposer aux stagiaires majeurs.

B) Toutefois, il peut être fécond, avec Ricœur par exemple, d’établir une distinction, ce qui n’exclut pas de penser leur complémentarité.

Morale

Ethique

Ensemble des règles et des valeurs auxquelles un individu doit se conformer

Définition

Réflexion sur les fins de l’existence humaine

Que dois-je faire où ne pas faire ?

Problème

Comment bien vivre ?

Perspective déontologique

Devoir

Visée

Perspective téléologique

Visée d’une fin

Vertu>bonheur

Origine transcendante

Nature de la norme

Vertu=bonheur

Norme immanente

Historiquement, l’éthique serait antérieure et la morale serait apparue avec la nécessité de dire non au mal et de se protéger face aux débordements violents.

Tentative pour penser la complémentarité des deux, au service de la déontologie :

Ce que la déontologie doit emprunter à l’approche morale

Ce que la déontologie doit emprunter à l’approche éthique

- le courage du « non »

- le primat d’une identité visée positivement sur une liste d’interdits.

- exigence d’universalité

- le souci du singulier (la nécessité de (¹ à chacun sa déontologie) s’adapter à chaque cas).

«Toute détermination est une négation» écrit Spinoza.

Transposition à notre problème : toute détermination d’une identité est délimitante et – par suite – même si elle ne veut pas exclure au sens moral - exclut ipso facto par le fait même qu’elle délimite. Une identité totalement ouverte est fuyante est sans consistance, ce n’est pas une identité.

Proposition d’une définition construite de la déontologie

A partir du double héritage morale / éthique.

Discours qui cherche à définir à partir des valeurs qui fondent et constituent l’identité (d’une association par exemple) les règles et les devoirs permettant à ses cadres d’incarner cette identité et de lui donner vie » (définition proposée par Simon Rochereau à partir des auteurs préalablement cités).

Discours qui cherche à = registre réflexif de l’interrogation, avoir une déontologie ¹ avoir un code figé. Il s’agit plutôt de produire et d’actualiser une réflexion sur le lien identité/pratiques. Démarche de recherche non dogmatique, recherche d’un ajustement constant aux situations.

valeurs … identité = pôle de la visée. Statut de FIN.

règles et devoirs = pôle de délimitation. Statut de MOYEN

incarner… donner vie = registre de la concrétisation. Faire vivre une identité