Il importe pour chaque stagiaire que la session soit l’occasion de se connaître et de déceler son propre potentiel, de donner ou de redonner un sens à sa vie. L’Afocal n’est pas un organisme d’apprentissage technique...
Les accueils collectifs de mineurs étaient jadis définis dans le décret de 1960 instituant les « CVL » comme des espaces éducatifs où, dans une atmosphère de jeu et de détente, les enfants font l’apprentissage de la collectivité en toute sécurité. La mission confiée par Jeunesse et Sports à l’Afocal, et par elle à chacun des formateurs, est de préparer des jeunes à assumer le rôle et les responsabilités d’un animateur dans ces structures. Mais le BAFA n’est pas seulement un titre reliant des aptitudes à un rôle ; les sociologues l’observent, c’est un passage ritualisé à l’état d’adulte comme pouvait l’être le Service national ou l’est encore le permis de conduire.
C’est bien ainsi que l’envisage l’Afocal, puisqu’autant ses statuts que la Déclaration fondamentale nous invitent à former des « adultes responsables ». Et pour réaliser ce but, tous les acteurs de l’association sont engagés à mettre en œuvre l’accompagnement : « les associations membres de l’Afocal tendent à une finalité commune, à des exigences communes mais aussi à une pédagogie commune : celle de l’accompagnement ».
Avant de fixer les contours de cette pédagogie de l’accompagnement à partir des propos de Michel RICHELMY, Président honoraire de l’Afocal, nous évoquerons le contexte dans lequel se trouvent ceux qui, un jour, sont appelés à aider les autres à grandir.
Formation, instruction, éducation
Précisons les notions…
instruire
transmettre des savoirs, des éléments nécessaires à l’apprentissage de base à partir de dispositifs particuliers qu’on appelle « pédagogie »
éduquer
- transmettre un système de normes, de conduites, de valeurs affectives et sociales
- aider une personnalité à se construire et lui permettre ainsi, d’accéder un jour à la maîtrise de ses choix (moraux, professionnels, sociaux)
Dans bien des secteurs, instruction et éducation, loin d’être antinomiques, se rejoignent et, pour le moins, sont complémentaires. Ces deux notions correspondent également à une évolution des besoins et à un mouvement général de développement. Par exemple, l’ancien ministère de l’instruction publique se nomme aujourd’hui le ministère de l’Éducation auquel on ajoute parfois le qualificatif « nationale ». Nous voici donc en face de 2 notions : l’instruction, généralement caractérisée par la transmission de savoirs et l’éducation dont la dominante est le développement de la personnalité. Et nous allons retrouver ces deux axes dans la formation parce qu’elle est, comme le propose Guy AVANZINI, l’activité menée en vue de confier au sujet une compétence précise et limitée.
former
- transmettre un savoir (comme enseigner), mais cela va plus loin ; La formation inclut aussi la transmission d’une méthode, d’un « savoir-faire » et d’un modèle de conduite, de « savoir-être » car c’est la pratique qui constitue sa finalité ;
- accompagner une personne vers des objectifs fixés en commun en termes de savoir, savoir faire et savoir être, dans un domaine particulier et un temps donné. En cela, c’est la formation qui est un processus de transformation globale de la personne.
Dans le cadre des sessions, notre démarche relève quelque peu de l’instruction et de la formation, puisque nous allons transmettre des choses que l’on sait (ou que l’on a expérimentées), mais également de l’éducation.
En effet, l’Afocal n’est pas un organisme d’apprentissage technique, et la session n’est pas pour nous un lieu exclusif d’acquisition ou de validation de compétences. Dès lors, il importe que la session soit l’occasion pour chaque stagiaire :
- de se connaître et de déceler ainsi son propre potentiel ;
- de mieux se situer par rapport aux autres ;
- de donner ou de redonner un sens à sa vie ;
- et, bien sûr, d’acquérir des compétences (nous y reviendrons).
Pédagogie(s) ?
Il existe plusieurs courants pédagogiques, illustrés par de nombreuses pratiques d’éducateurs. Le classement de telle ou telle est déterminé par 2 critères : la position du savoir (chez l’apprenant, ou chez le formateur ou les 2), et la prise en compte, ou pas, de la dimension affective de la formation. Le « Guide pratique du formateur » de Didier NOYER et Jacques PIVETEAU (ed. INSEP Consulting) les distingue à peu près comme ceci :
le courant traditionnel
le courant comportementaliste
Principe : le maître possède le savoir
L’apprentissage doit être organisé pour que le formateur transmettre ce qu’il sait au formé. C’est pour cela qu’il privilégie les outils tendant à favoriser la mémorisation du savoir par les formés. L’outil symbolique de cette pratique est l’exposé.
Principe : on peut faire évoluer le comportement de quelqu’un en le soumettant à des stimulations externes (Pavlov, Skinner)
Chaque compétence à acquérir est analysée en étapes, et chaque fois qu’une étape est franchie le formé reçoit une “récompense”.
le courant humaniste
le courant fonctionnaliste
Principe : l’apprenant est spontanément motivé pour apprendre (Carl Rogers)
Le formateur est alors un conseiller dont l’objectif est de développer l’autonomie de son apprenant. Parce qu’il prône l’abandon des notions de contrôle et de programme, ce mouvement a donné naissance à la non-directivité.
Principe : le formé doit savoir à quoi sert la formation et être impliqué dans son déroulement (Mager)
Le formé connaît les objectifs et le programme, et il contrôle lui-même le processus de la formation. Le formateur a pour tâche la réalisation des objectifs de la formation (pédagogie par objectifs). Ce type de courant fonde les méthodes de préparation des sportifs de haut niveau.
Nous pouvons, sommairement, isoler deux attitudes opposées qui permettent de prendre une position :
- une pédagogie laxiste qui ne fixe aucune norme, aucune limite, très libertaire, telle qu’elle fut vécue, au siècle dernier, par les « maîtres camarades » de Hambourg, pédagogie finalement proche d’une philosophie rousseauiste (on observera que ceux qui préconisent cette attitude permissive ne vont jamais jusqu’au bout de leur pratique. Il arrive toujours un moment où le bon sens ou la réalité les contraint à établir une limite, à fixer des interdits) ;
- une pédagogie dirigiste, laquelle se signale à la fois par une application aveugle de principes et de normes et par une méconnaissance, voire un mépris d’autrui.
L’Afocal a choisi une « troisième voie » : pas une pédagogie qui se situerait, par souci d’équilibre, entre les deux extrêmes et qui, finalement, donnerait à la fois bonne conscience et une certaine commodité.