Une déontologie : entre Déclaration fondamentale et règlement intérieur, tentative de définir une identité dans le registre pratique et vécu. Réponse à la question : « comment peut-on et doit-on incarner nos valeurs ? »
II/ Réflexion pour la mise en œuvre d’une déontologie du formateur
A) Détermination
Part historique
-Nécessité de connaître l’origine et l’évolution de l’association
(qui l’a fondée ? / quand ? / Pourquoi ?/ Grandes étapes de son évolution)
-Respect mais aussi recul critique, nécessité d’interroger les textes.
Réactualisation
-Nécessité d’une réactualisation des discours. Remise en cause pour intégrer, prendre acte des changements d’une société (¹s’y soumettre), aider précisément les formateurs à se positionner. Il faut produire un discours vivant, actuel , porteur de notre identité. Importance de la parole - incarnation d’une valeur - qui porte la pratique.
B) Formulation
1- Nécessité de formuler d’une manière positive les règles déontologiques (éviter les « ne pas »).
2- Formuler en termes d’exigences plus que de contenus.
C) Application
* Apport biblique :transcendance de la valeur sur la règle. Il ne s’agit pas de supprimer la règle mais de toujours réfléchir, dans son application, à la valeur au service de laquelle elle existe et sans laquelle elle n’est plus rien qu’une exigence vide.
CF Matthieu, 5, 34 à 38 / Parabole de l’enfant prodigue : la bienveillance plus fort que la règle / Parabole du bon grain et de l’ivraie : prenons garde de ne pas exclure trop vite pour non respect de la règle, attendons les fruits.
* Apport d’Aristote, Éthique à Nicomaque : il faut une règle qui protège de l’arbitraire, donc une règle universelle qui s’applique à tous de la même manière. On peut prévoir des décrets d’application qui en précise les modalités concrètes mais aucune règle ne peut prévoir toutes les situations singulières auxquelles elle sera confrontées. L’application de la règle requiert nécessairement le discernement de celui qui l’applique, qu’aucun code ne peut donner théoriquement. Aristote propose un modèle pratique, l’homme équitable. Je ne dois pas copier ce qu’il fait mais comment il fait, avec quel discernement. Pour être pleinement juste, au sens d’équitable, il faut savoir adapter une règle générale à un cas particulier. C’est un travail individuel qui nécessite de faire confiance à ceux qui appliquent les règles (ici aux formateurs). L’institution doit faire confiance à ses formateurs et à leur discernement. Elle ne peut et ne doit demander à ses formateurs d’appliquer les règles à la lettre. Une déontologie ne dispense pas de discernement mais appelle un discernement.
* Apport de Bergson : un idéal n’est jamais porteur à lui tout seul, il faut qu’il soit incarné. Les formateurs – comme les stagiaires – n’adhéreront que s’ils voient ces valeurs incarnées. Appel de certaines figures : l’homme équitable chez Aristote, le saint chez Bergson – sens religieux et sens laïque, le référent en session.
Interrogation pour chacun : notre comportement et nos actions en session constituent-ils un appel suffisant pour susciter l’adhésion de ceux que nous formons ?
III/ Difficultés possibles d’application
A/ Conflit entre les valeurs personnelles et la déontologie professionnelle
- Quand notre déontologie est plus restrictive que l’éthique du stagiaire.
= Les stagiaires sont accueillis tels qu’ils sont. Leur unique cadre est celui des critères d’évaluation. Tous les stagiaires sont les bienvenus, nous n’acceptons pas tous les formateurs sans discernement. Vis-à-vis des stagiaires, tout au plus peut-on proposer un comportement qui constitue un appel à suivre nos valeurs, mais il ne doit pas s’agir d’un prosélytisme ou d’un militantisme. Nous délivrons une formation reconnue par l’Etat et sanctionnée par un jury officiel. Tous les horizons politiques ou religieux doivent pouvoir suivre nos sessions sans se sentir marginalisés. La déontologie s’adresse aux cadres. Du fait de leur fonction, ils ont parfois des exigences plus restrictives que celles des stagiaires. Par exemple, un stagiaire pourrait lancer un débat politique en lien avec l’actualité, on peut se demander si le formateur est dans son rôle en lançant un tel débat.
- Mon éthique est moins restrictive que la déontologie de l’AFOCAL. (Autrement dit je suis plus cool que la déontologie de l’AFOCAL) = Primat de la fonction dès lors que je l’accepte par contrat. Voir B – Éléments complémentaires
- Mon éthique est plus restrictive que la déontologie de l’AFOCAL = Même primat de la fonction. Je ne peux imposer aux stagiaires mes valeurs.Ici, la déontologie protège le stagiaire d’un débordement des exigences personnelles des formateurs (je n’évalue pas si – en tant que directeur – je recruterais ce stagiaire mais s’il a répondu aux critères de Jeunesse et sport).
Important
- Je peux me prononcer – avec conviction mais mesure - sur les enjeux de l’animation mais il vaut mieux éviter les enjeux extérieurs, de société, sur lesquels je n’ai pas à me positionner publiquement (je risquerais d’engager l’AFOCAL).
- Nécessité, en session, de montrer la différence entre son positionnement privé et son positionnement professionnel.
Usage public* de la raison
* faux ami = dans ma vie PERSONNELLE
Usage privé** de la raison
** faux ami = dans ma vie PROFESSIONNELLE
Usage que je fais de ma raison…
… en tant qu’homme
Usage que je fais de ma raison…
… dans ma profession
ILLIMITÉ
Nul n’est fondé à restreindre cette liberté ou ses manifestations (prise de parole, publication, engagement politique, etc.)
LIMITÉ
Je dois (auto) restreindre
l’exercice de ma liberté
Pour sauver la liberté
Pour sauver l’ordre et la cohérence
Je suis toujours fondé à dire ce que je pense, à remettre en cause les règles et valeurs que l’on m’impose et à militer en dehors du cadre professionnel
J’ai un devoir de réserve dans
mon cadre professionnel
Conclusion
- Une déontologie : entre Déclaration fondamentale et règlement intérieur, tentative de définir une identité dans le registre pratique et vécu. Réponse à la question : « comment peut-on et doit-on incarner nos valeurs ? »
- Déontologie à construire et à faire vivre : caractère vivant, exégèse reconduite des textes, écoute des remontées.
- Confiance dans les formateurs qui doivent faire appel à leur discernement dans l’application
- On n’attend pas la même chose des stagiaires et des formateurs. Pour les stagiaires on se concentre sur les critères d’évaluation. Les formateurs ont des exigences supérieures.
-Déontologie = moyen de faire vivre une fin. Nous ne nous devons jamais absolument (rigidement) au moyen, mais seulement à la fin visée.
S. Rochereau