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Le jeu : un atout pour apprendre

Article de Marc GUIDONI Commentaires fermés sur Le jeu : un atout pour apprendre

Jeu BAFAC’est une caractéristique évidente de nos métiers, au point qu’elle participe parfois au regard condescendant que peuvent porter certains sur la profession : nous jouons, et nous aimons le faire. Autre évidence, le jeu est un élément déterminant de la construction des enfants, au point que la Convention de New York rappelle à tous dans son article 31 que « les enfants ont le droit de jouer ».

Mais il faut se garder de voir une bonne nouvelle dans cette reconnaissance d’un droit de jouer. Au contraire, c’est le signe que, dans le monde, les occasions données à des enfants d’être simplement des enfants sont de plus en plus rares. D’ailleurs nous-mêmes, les professionnels du jeu, ne nous arrive-t-il pas de faire de nos activités des temps d’apprentissage trop ambitieux ? Une distinction, fine, doit être faite entre jouer pour apprendre et apprendre en jouant.

Jeu et apprentissage : une évidence

Unanimement, psychologues, parents et éducateurs constatent que les enfants apprennent surtout en jouant, d’autant plus que le jeu constitue leur activité principale. C’est ainsi que l’on a pu dire que le jeu tenait dans la vie de l’enfant la place que le travail tient dans celle des adultes. Il permet aux enfants de faire l’expérience du monde ; il sert à imiter le cadre social qui permet de nouer des relations pour la vie.

Les médecins apprécient l’impact du jeu, organisé ou spontané, dans le développement de l’enfant : coordination, force, endurance mais encore réflexion, imagination, mémoire … Autant d’objectifs classiques qui sont poursuivis dans les projets pédagogiques des directeurs et des équipes d’animation. Normal : des activités sympas et un grand jeu suffisent à les atteindre ! (pas sûr …)

Moins sensible, et pourtant primordial, le jeu est aussi lieu de construction de l’estime de soi. En se découvrant de nouvelles capacités ou en mettant en œuvre ses savoir-faire, l’enfant fait l’expérience de son propre développement. Il valide d’autant plus ses compétences qu’il se créé un réseau d’amis avec lesquels il collabore, partage... et qui contribue à lui donner une bonne opinion de lui-même. C’est souvent ici qu’intervient l’adulte, en posant des règles qui vont favoriser ces apprentissages, et notamment l’intégration du « mode respect ».

Quand les adultes jouent le jeu

BAFA Jeux

Les adultes doivent s’investir dans le jeu, ce n’est pas nouveau. C’est d’autant plus important qu’ils y créent le contexte dans lequel les enfants expérimentent le comment bien se comporter et bien traiter les autres. L’adulte, par sa présence et son exemple, contribue à créer un climat de sécurité affective favorable au renforcement de l’estime de soi et au vivre ensemble.

C’est bien connu, il y a ainsi plusieurs moyens d’être présent dans le jeu (jouer avec, faire jouer, donner à jouer ...). Le choix est bien souvent déterminé par la volonté, chez l’adulte, d’apporter quelque chose. Cela peut vite dériver et perdre sa vocation éducative.

Sensibles à la nécessité de proposer des activités variées qui ont l’objectif de faire passer aux enfants de bonnes vacances et, bien souvent, de leur faire oublier que l’accueil se déroule dans les mêmes locaux que l’école, les équipes d’animation se donnent du mal pour créer des imaginaires sophistiqués au service de jeux de toutes tailles (petits, grands, …). Tenus par des directeurs qui redoutent l’inactivité des enfants, les plannings sont biens remplis. Garder les enfants dans des activités organisées est en outre un gage de sécurité (et donne une meilleure image que des enfants assis sur un banc dans la cour). Si l’on ajoute que les enfants ne parviennent pas à jouer seuls sans conflits, on finit par conclure que le jeu est quelque chose de trop sérieux pour être abandonné aux enfants.

C’est un constat souvent partagé par les pères/mères de famille, qui désespèrent d’obtenir de leur fils qu’il utilise efficacement train électrique, une poupée, ou construise avec des briques multicolores autre chose que des tours dont l’effondrement pathétique était évident dès la première seconde. Que dire lorsque le bambin s’efforce de saisir le ballon de foot avec les mains. La réponse n’est pas toujours de faire jouer les enfants, ou de les inviter à des jeux structurés, conventionnels.

BAFA Jeux jouetsLes projets d’apprentissage par le jeu les plus aboutis se caractérisent par la proposition non pas de ‘jeux à jouer’ mais de (longues) périodes quotidiennes où les enfants choisissent ce qu’ils veulent faire. L’équipe ne propose plus, au sens où elle ne consacre plus de longues soirées (nuits ?) à préparer des activités toujours plus complexes. Non, elle imagine et aménage des espaces, met à disposition des jouets, des costumes, des livres, du matériel... en fonction de sa connaissance de son public (capacités, intérêts, préférences, caractéristiques de chacun). Et les animateurs montrent comment on se sert de tout cela, en sécurité. Ils ne sont pas là pour occuper à tout prix les enfants, mais ils les observent, ils interviennent pour répondre à un besoin, pour permettre au jeu d’évoluer, pour soutenir chacun et évidemment assurer la sécurité. De fait, c’est en permettant aux enfants de choisir leurs propres activités, qu’on les laisse prendre en main leurs apprentissages. Et l’on observe que le jeu va se perfectionner au gré du développement de l’enfant.

Evidemment, tout cela est affaire d’équilibre : entre des temps plus structurés pour répondre aux nécessités de la collectivité (et conquérir des objectifs pédagogiques ambitieux) et des temps ‘libres’ qui permettent aux enfants de choisir leur rythme. Le message essentiel qu’il faut tenir est ailleurs, dans le rôle que la technique joue trop souvent dans les sessions de formation d’animateurs ou de directeurs. Certes, connaître des jeux et des chants, des activités manuelles est un bon moyen de s’en sortir ; aimer jouer reste pour moi la compétence déterminante pour un animateur. Mais il faut aussi (surtout ?) sensibiliser le jeune qui s’engage dans ces responsabilités sur le fait que l’activité n’est que le support de la relation qu’il créera avec les enfants et les jeunes qui lui seront confiés. C’est à réussir leur projet qu’il devra s’employer, par les employer à réussir le sien.

A partir des situations présentées dans un article sur le jeu et l’apprentissage proposé par la Fédération canadienne des services de garde à l’enfance www.cccf-fcsge.ca